J’ai assisté hier à la conférence de Matthieu Ricard et Christophe André – Alexandre Jollien étant hélas absent, il vit en Corée – et ce dont je suis sûre c’est que, contrairement à moi, ces deux hommes ne sont pas en quête : ils vivent pleinement la sagesse !

Le moine et le psychiatre ont écrit le livre Trois amis en quête de sagesse* avec le philosophe (A. Jollien). Grappillant dans le désordre des paroles simples et justes comme la sagesse, j’ai beaucoup apprécié cet ouvrage pour sa richesse de propos évocateurs de ce que vivent nombre d’entre nous : un cheminement vers le mieux-être, semé d’embûches et de remises en questions, une aspiration au bonheur et à moins de souffrance pour nous et – dans le meilleur des cas – pour les autres.

Or les écrits que j’ai parcourus sont en cohérence avec leurs auteurs : lors de la conférence – où je n’ai pu résisté à l’envie de faire dédicacer mon livre – j’ai entendu deux hommes brillants et accessibles comme je les aime.

Matthieu Ricard, dont j’ai cependant bu les paroles, m’a paru moins limpide que son ami Christophe André, ce dernier faisant preuve d’une sincérité et d’une générosité particulières dans son discours. Je le lui ai d’ailleurs glissé lors de la dédicace et il en a paru honnêtement touché. On le voudrait pour ami. Le moine, lui, est paradoxalement pragmatique (d’autant plus à l’oral que dans le livre). Mais, bien que plus technique – et cela rend passionnant son raisonnement – et un peu plus détaché sans doute par “déformation” de sa longue pratique de moine bouddhiste, il est cependant profondément convaincant des vertus de la bienveillance et de la méditation. J’ai même, à cette occasion, découvert la méditation bienveillante, que je ne manquerai pas d’évoquer lors d’un post et, surtout, de pratiquer.

Durant ces deux heures d’écoute, entrecoupée de deux petits exercices de méditation – de pleine conscience et de bienveillance – j’ai engrangé une foule de pensées positives pour alimenter mon cheminement personnel et mon rapport aux autres, des idées de composition d’articles et de pratique d’exercices, et des sourires intérieurs qui font du bien à l’âme.

Loin des litanies dogmatiques, ce ne sont pas des conseils qui nous sont prodigués, car leur humilité les garde de la facilité d’indiquer ce qu’il faut faire. Ce sont plutôt – comme le précise très bien Christophe André – des partages d’existences, la leur et celles de rencontres, de patients, amis, maîtres spirituels. Ils nous ont offert un voyage autour de l’humanité par le biais de reportages non dénués d’humour : sur l’écologie émotionnelle (savoir faire le tri, réguler et atteindre une stabilité), sur le discernement créé par la grande liberté intérieure elle-même atteinte grâce à la sagesse, sur les méfaits du matérialisme qui délabre avec ses valeurs de possession et de domination, sur les distorsions de l’ego et le “DonaldTrumpisme”, sur les bienfaits de l’écoute bienveillante qui nécessite attention et amour, ou du non attachement au sens bouddhiste, sur le pardon (qui n’est pas l’absolution mais la libération d’un ressentiment qui entretient le cycle de la souffrance), sur l’impermanence des choses qui permet de se dire que rien n’est à 100% désirable ou indésirable et donc non source de souffrance, etc… Beaucoup de notions empruntées à l’enseignement bouddhiste mais qui peuvent tout à fait rencontrer un public profane ou trouver des accointances avec la croyance en un Dieu chrétien, tel que l’explique dans l’ouvrage Christophe André qui s’appuie sur les deux pour nourrir sa foi en la vie et son sens de la fraternité.

Pour Matthieu Ricard “nous nous précipitons sur la lame acérée de la loi de cause à effet” : on cherche au mauvais endroit les conditions de l’épanouissement, c’est-à-dire dans une réalité faussée, qui n’est que souffrance. Or c’est d’abord à l’intérieur de soi que l’on trouvera un meilleur état d’être.

Durant les échanges, j’ai souvent opiné du chef ou murmuré un “oui” tant les évocations faisaient écho avec mon être et me semblaient évidentes!

Les conférenciers d’hier et leur confrère dans le livre nous invitent ainsi par différents ponts à rejoindre le chemin de la liberté intérieure et de perfectionnement de son être et nous offrent des outils de transformation mentale – comme par exemple se soigner par l’auto-bienveillance qui elle-même permet de parvenir à l’oubli de soi (ego) pour s’ouvrir aux autres et ressentir la compassion. Ils nous rappellent également qu’il ne faut pas tarir d’efforts car c’est par une inlassable pratique que l’on perfectionne l’esprit, comme un sportif entraîne son corps.

Dans le livre, qui apporte un flot de réponses à nos questions de vie, Alexandre Jollien, si touchant et profond dans son témoignage, complète la pensée : “l’enseignement du zen est clair : tout faire impeccablement, et être détaché du résultat .”  De mon côté, je le ressens : le chemin de la quête, s’il est fait de son mieux, est alors plus gratifiant que d’atteindre la sagesse du moine.

Christophe André, à la fin de cette soirée, revient sur le message principal du livre et de la conférence : “au fond, tout ce dont on parle – la bonté, la bienveillance, l’altruisme, la paix…- on le sait. On (l’être humain) sait qu’il faut le faire…mais le fait-on?”

Pour ma part, je me dis qu’avec de telles belles personnes -et d’autres- on a encore davantage envie de le faire, et, comme le dirait Matthieu Ricard, “de tout coeur”.

*Ed. L’Iconoclaste, Allary Editions

nb : les droits d’auteur et les recettes de la conférence sont reversés à l’association de projets humanitaires Karuna-Shechen.

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