Malgré mes petites manies et mon goût de la solitude – a priori des obstacles – j’aurais aimé vivre en communauté. Un peu pour « l’expérience » et beaucoup pour le sentiment d’appartenance.
J’envie, sans savoir si j’en serais capable, les familles qui s’échappent de la modernité citadine pour retrouver l’esprit collectif des campagnes, à l’ancienne, ou de lieux créés de toutes pièces tels que les Oasis du mouvement Les Colibris, afin d’y trouver la justesse de la vie quotidienne dans sa sobriété, sa convivialité et sa solidarité. Comme un retour en arrière (ou un véritable bond en avant?) où l’entraide prime sur l’égoïsme forcené.
Ce que j’aime en tout cas dans l’esprit de communauté c’est lorsque l’on se retrouve les uns contre les autres, serrés par des envies communes et enveloppés dans nos sentiments réciproques. Lorsque l’on ressent le partage presque dans sa chair, lorsque cette chaleur contribue à la paix intérieure. Je me projette encore avec tendresse dans les Quatre filles du Docteur March.
Avec ma communauté à moi, on ne partage pas toujours le gîte, mais bien souvent le couvert. Et c’est encore mieux lorsque cela se prolonge des journées entières ou par des escapades au sein de nos espaces de vie : en séjournant dans ma famille ou en accueillant mes amis, je me sens entière et complémentaire. Nous sommes alors une population d’espèces différentes – voire incompatibles – mais libres, qui se mélangent et tissent une toile de bien-être, aussi fragile qu’elle puisse s’avérer. Une union, non exclusive, de quelques âmes, réunies sans but et sans attentes démesurées.
Par moments, avec mes voisins – et néanmoins amis – on rit à l’idée de créer un kibboutz… Pour le moins, je tente de vivre le plus souvent possible des moments collectifs, sans doute à défaut de pouvoir partager mon quotidien dans un hameau où je donnerai les œufs de mes poules à ceux qui m’apporteraient de la soupe ou des raisins de leur récolte, ou bien un coup de main pour bricoler.
Un brin désuet comme aspiration, je vous l’accorde, mais il s’agit selon moi d’une source intarissable de vrais petits bonheurs, de ceux qui comptent double.
J’ai adoré ces temps d’été où, au village en Corse, les tablées familiales se complétaient de visites de parents ou d’amis, souvent inopinées, ponctuées elles-mêmes d’après-midi entières puis de soirées entre jeunes des différentes maisons : de l’entrain, de l’éveil, du plaisir, des frissons, des rires, des craintes et des espoirs… des souvenirs d’autant plus denses qu’ils imprimeraient plusieurs corps et mémoires.
Autant j’ai quelque réticence à demeurer de longues heures à table pour des repas dominicaux, autant je porte une réelle affection aux dîners de Noël et aux mariages ! Ces moments où les délices gustatifs et les discussions endiablées, ambiancés de musique, posent les marques du temps sur nos enthousiasmes, telles des rides sur une peau de bébé.
J’aime particulièrement les rassemblements de sentiments, au point d’avoir souhaité en faire une tradition : les retrouvailles dans la maison de ma grand-mère, avec buffet-jardin-musique et pétanque, les week-end entre « vieilles » amies ou encore les dîners d’anniversaires où nous sommes plusieurs « januaristes » (natifs de janvier) à nous réunir chaque année pour découvrir un restaurant de cuisine étrangère. Nous aurons d’ailleurs bientôt fait le tour du monde !
Selon le Père africain Oscar Bimwenyi-Kwesshi, « la tradition est le lieu où se configurent les valeurs spirituelles fondamentales qui donnent sens à la vie ». Or cette tradition de partage collectif me réconforte. Elle me conforte dans ma vision que je ne fais qu’un avec les autres membres de la communauté humaine et que l’on vit mieux ensemble, puisque les autres sont mes compléments directs et indirects.
Qui plus est, après une immersion en communauté, je retrouve avec d’autant plus de sérénité mes moments solitaires, ressourçant à souhait mon esprit exigeant…
Et vous, êtes-vous plutôt solo ou altro?
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