Le lièvre et le baobab
Un roi avait une fille plus belle que toute les femmes du pays. Et les demandes en mariage lui arrivaient chaque matin, de plus en plus nombreuses. Un jour, il fit dire dans tout le royaume :
– Je marierai ma fille à celui qui traversera d’un seul coup de flèche le gros baobab qui se dresse sur la place du village. Une fête sera donnée. Tous ceux qui veulent gagner ma fille viendront avec leur arc et leur flèche : ils essaieront leur force et leur adresse.
Le roi pensait ainsi garder toujours sa fille, car le baobab du village était plus gros qu’une case, et personne, semblait-il, ne serait assez fort pour le traverser d’un seul coup de flèche.
Mais… le lièvre avait entendu, et le lièvre aurait bien voulu épouser la riche et jolie fille du roi. Or, qui donc est plus malin que le lièvre?
Notre animal s’en alla trouver le perce-bois de ses amis et lui dit :
– Perce-bois, mon ami, je t’ai rendu bien des services. A ton tour de m’aider. Tu vas percer de part en part le gros baobab qui se dresse sur la place du village.
L’insecte partit et se mit à l’ouvrage aussitôt. Il gratta, il rongea, il travailla avec tant d’ardeur qu’en trois jours la besogne fut terminée.
Le lièvre fabriqua une flèche assez petite pour passer par le trou ; puis il ferma avec de la toile d’araignée les deux ouvertures. Tout cela fut si rapidement et si habilement, que personne ne se douta de rien.
Le jours de la fête arriva. Ce furent les gros animaux qui commencèrent : l’éléphant, le lion, le buffle ; mais les plus forts arrivèrent tout juste à enfoncer dans l’arbre le fer de leur flèche. Furieux, ils vinrent se rasseoir à leur place.
Le tour du lièvre était le dernier. Notre animal, vêtu d’une large pantalon bleu, d’un veston vert à boutons dorés, coiffé d’un chéchia rouge, se leva lentement d’un air fier et important.
Tout le monde éclata de rire :
– Comment, disaient les spectateurs, voilà le lièvre qui veut se montrer plus fort que le lion, le buffle et l’éléphant!
Le lièvre, dédaignant les moqueries, salua humblement le roi ; il salua galamment la fille ; il salua dignement les grands chefs et les notables. Puis il s’en alla à la place réservée au tireur.
il mit un genou en terre, visa longuement et – han! – il lâcha la flèche. La flèche partit en sifflant ; elle arriva juste sur la toile d’araignée, traversa le baobab et souleva la poussière par derrière.
Un cri d’admiration s’éleva de la foule : « Le lièvre a gagné! Le lièvre a gagné! « .
La jeune fille lui fut donnée à l’instant et il partit, la tenant par la main, tandis que sur son passage la foule s’écartait respectueusement et poussait des cris d’enthousiasme.
*D’après un conte de l’Afrique Noire in Contes de la Brousse et de la forêt, livre de cours élémentaire et cours moyen, Librairie Istra, édition 1932).
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