La pensée de la semaine de Matthieu Ricard* est la suivante :
« Avant de vouloir prendre soin d’autrui, il faut d’abord être capable de s’aimer soi-même. L’amour de soi ne s’appuie pas sur un sentiment de dette personnelle dont nous serions redevables envers nous-mêmes, mais simplement sur le fait que, par nature, nous aspirons tous à être heureux et à ne pas souffrir. Ce n’est qu’après avoir accepté cette bienveillance à l’égard de soi qu’il est possible de l’étendre à tous les autres. «
Fourteen Dalai Lama, TENZIN GYATSO (B. 1936) – Extrait résumé et adapté de Les Voies spirituelles du bonheur, Points Sagesse, Seuil, 2004.
Cette pensée m’a donné envie de conjuguer , tel un verbe, le mot bienveillance au je, au tu et aux autres, au présent, passé, futur et autre subjonctif non subjectif !
Il est vrai que l’amour de soi naît d’une bienveillance envers ce que l’on est, une forme d’autocompassion face à nos défauts, nos faiblesses, nos limites, nos échecs, notre physique, notre apparence.
Pour le moins, il s’agirait de baisser son curseur d’exigence voire d’intransigeance affective, professionnelle et physique.
Cela semble facile en théorie, me direz-vous ? Cela ne va pas de soi mais la tâche n’est pas si ardue, il faut un peu d’entraînement, en débutant par des moments simples : écouter ses émotions, rejeter les injonctions culpabilisantes, se demander comment on aimerait être traité et si on traiterait ses proches ainsi ? Se dispenser de juger ses propres limites, ses moments de faiblesse, de fatigue, de douleur. Et se laisser envelopper du moindre petit plaisir à saisir, de douceurs propices à se faire du bien.
Par exemple, j’ai pu noté ce matin que la musique qui rythmait mes étirements et ma méditation me donnait grandement envie de sourire à mon corps, et ce malgré les grimaces qui avaient émaillé mon visage lors de postures un peu douloureuses et des bourrelets qui freinaient certains mouvements, en ignorant à la fois le regard du professeur et mon reflet dans le grand miroir, juste penser à profiter des sensations, en faisant preuve de bienveillance à mon égard.
Alexandre Jollien et Christophe André nous le confirment en choeur : c’est cette auto-bienveillance qui peut nous éviter de tomber dans le piège de la quête perpétuelle de l’approbation d’autrui. De plus, en nous aimant mieux nous-même, nous apprendrons peu à peu à mieux aimer autrui, et avec plus de discernement.
Pratiquer l’autocompassion et bien se traiter soi-même dans un monde hautement toxique dans son environnement compétitif, aide donc à gagner en estime de soi, en confiance et ainsi à s’ouvrir : mieux nous nous traitons et mieux nous traitons les autres. Car l’altruisme ne veut pas dire abnégation de soi, il est au contraire favorisé par l’amour que l’on se porte, en prenant conscience de soi.
Je me dis que si je conjugue la bienveillance à la première personne du singulier, je ne manquerai pas d’accorder ce mot à toute la déclinaison des instants de la vie.
*moine bouddhiste, auteur. de « Plaidoyer pour l’altruisme ». Il publie chaque semaine un sourire et une pensée in http://www.matthieuricard.org.
La photo est de M. Ricard : moine tibétain prenant le pouls d’un enfant (2005)
Laisser un commentaire